Second volet de Nevernight, de Jay Kristoff, une trilogie de dark fantasy caustique et sanglante publiée chez De Saxus. Dans le premier tome, on découvrait Mia, une enténébrée – capable de dompter les ombres et de disparaître en elles – assoiffée de vengeance et prête à tout – y compris à se muer en une tueuse redoutable – pour faire payer les assassins de sa famille. Dans ce deuxième livre, elle va se transformer en Russell Crowe pour affronter les jeux du cirque et d’autres gladiateurs. Avec une scénographie digne du Puy-du-Fou, le côté tradi catho en moins, elle va fouler le sable des arènes toujours avec le même objectif en tête. Autant dire que ça mouche rouge tout le long de l’histoire.
J’avoue ne pas être toujours client de l’humour de Jay Kristoff, que je trouve tour à tour savoureux ou graveleux. Idem pour les très nombreuses (moins que dans le premier tome, m’a-t-il semblé cependant) notes de bas de page qui viennent émailler le texte, que j’interprète tantôt comme du world-building maladroit et tantôt comme des clins d’œil pleins de connivence rappelant au lecteur qu’il n’est qu’un témoin de seconde main dans ce récit, comme si on le lui narrait dans une taverne autour d’une bonne chopine. À vrai dire, j’ai un peu la même impression aussi avec les scènes de combat (ou de sexe), qui me semblent parfois gratuites et redondantes, d’autres fois magistralement menées et palpitantes. Je ne pense pas que ce soit lié à une qualité ou un style inégaux au fil du roman, plutôt à une question d’état d’esprit au moment où j’ouvre le bouquin (ce qui explique les plages de lecture oscillant entre 10 pages terminées laborieusement et 150 avalées dans la soirée). Quoi qu’il en soit, l’impression est plus que positive, et je sais que je découvrirai le tome 3 avec grand plaisir, alors que c’est assez éloigné de ce que je lis habituellement (du moins ces temps-ci).
Curieusement, j’avais eu la même impression avec une autre trilogie de dark fantasy, traduite par bibi il y a quelques années – Blackwing, d’Ed McDonald : j’avais toujours du mal à m’y mettre et j’y allais à reculons, alors que j’aimais beaucoup le texte. Ce n’était juste pas ce dont j’avais envie à l’instant t. Blackwing était cependant beaucoup plus lent, limite introspectif, ce qui n’est jamais le cas ici.
Les amateurs de combats à l’épée (saupoudrés de magie), de descriptions crues et de « revenge movies » y trouveront sans conteste leur compte, les âmes sensibles, les vertueux (oui, car les coups bas pleuvent, et ce n’est pas une contrepèterie) et les poètes peut-être moins. Les aèdes bourrins – ce doit être mon cas – se retrouveront potentiellement le cul entre deux chaises…
À noter que ce style de romans est souvent pénalisé par une plume maladroite ou une traduction pataude, Jay Kristoff et Sébastien Guillot évitent ici tous deux l’écueil en mitonnant un texte pêchu et littéraire (quoique pas toujours châtié), qui le classe de toute façon dans le haut du panier.
