En vrai, j’ai un peu menti la dernière fois : il m’est aussi arrivé de sortir de l’autoroute pour me balader un peu (plus en un mois et demi que ces deux dernières années en cumulé je crois). Du coup, j’ai enfin vu Dune. C’est beau.

Et donc, j’ai aussi lu ça il y a peu. (Je regrette presque les transports en commun, qui, naguère, m’octroyaient des plages de lecture régulières.) (Non.) Et la prochaine fois, j’essaierai de faire des lectures (à l’heure), dans l’espoir que mes commentaires refléteront davantage ce que j’ai ressenti en refermant le bouquin que ce qu’il m’en reste six semaines plus tard.
Indian Creek, Pete Fromm, trad. Denis Lagae-Devoldère (Gallmeister)
Ça, c’est 100% la faute à mon libraire, je ne connaissais pas du tout cet auteur. Le point négatif, c’est que ça manquait cruellement à ma culture. Le point positif, c’est que j’ai maintenant plein de bouquins en retard à lire, d’autant qu’il paraît que ce n’est pas son meilleur.
Indian Creek, c’est l’histoire de cet étudiant pas fait pour les études qui aspire à faire une pause et à se retrouver seul pour respirer un peu. Il va être exaucé en se voyant chargé de surveiller quelques millions d’œufs de saumon en attendant leur éclosion au milieu de l’Idaho, histoire d’éviter que le bassin dans lequel ils se trouvent ne gèle et de s’assurer qu’aucune bestiole un peu plus grosse ne viendra faire une omelette avant que le cours d’eau ait pu être repeuplé.
Lui qui n’a jamais tenu un fusil ni fait de camping va se retrouver privé de tout confort moderne pendant plusieurs mois, au milieu d’un hiver glacial, sans autre voisin que les animaux plus ou moins gros de la forêt, avec pour seul décor les sapins et la neige. C’est une plongée en pleine nature à la fois drôle et prenante, même quand il ne se passe rien. On se met parfaitement à la place du narrateur et on en ressort comme d’un séjour de découverte à l’étranger : c’est à la fois long et court ; on est pressé que ça se termine (pour l’auteur/narrateur), mais on aurait bien prolongé l’expérience ; on ne sait plus si on a rêvé les scènes ou si elles se sont vraiment produites ; on fait des rencontres qu’on n’aurait jamais faites dans un autre contexte et crée des liens avec des individus improbables. Et on se demande si on aura le courage de se replonger dedans si l’occasion venait à se représenter, alors qu’on a adoré ça.
L’hiver dans l’Idaho, je ne sais pas, mais des Pete Fromm j’en redemande tous les jours !

Les Royaumes du Nord, Philip Pullman, trad. Jean Esch (Folio)
Ça fait partie des bouquins qui m’intriguent depuis des années, mais jamais suffisamment pour que je décide de m’y plonger. Et puis mon grand s’est mis à lire dévorer des bouquins, et j’ai assez vite épuisé ceux que j’avais en réserve et dont je savais qu’ils pourraient lui plaire. Du coup je me suis enfin résolu à attaquer À la croisée des mondes, et je dois dire que j’ai passé un bon moment avec ce premier tome. Je regrette un tout petit peu de ne pas l’avoir lu plus jeune, quand l’imaginaire me parlait davantage, parce que je crois que j’aurais vraiment adoré. Comme Harry Potter, on est à cheval entre la fantasy et le fantastique (monde réel mais pas uniquement, quelques créatures surnaturelles) ; comme HP, ça peut plaire aux adultes comme aux enfants (ça me semble cependant plus adulte) ; comme HP, l’héroïne est une ado orpheline. C’est en fait assez classique et il n’y a rien de transcendant, mais c’est plutôt bien écrit (quoique peut-être un peu vieillot pour un truc datant de 1995, 98 pour la trad de Jean Esch). Pour être honnête, je l’ai lu il y a un peu plus d’un mois, et j’ai déjà oublié une bonne partie de l’histoire, mais je ne doute pas que ça me reviendra quand j’ouvrirai la suite (car je compte aller au bout de la trilogie, ce qui, en soi, est bon signe).

My Absolute Darling, Gabriel Tallent, trad. Laura Derajinski (Gallmeister)
Pff, que dire de ce bouquin, si ce n’est que j’ai bien fait de ne lire qu’à la fin la préface de François Busnel (très intéressante au demeurant) ? Que c’est une grosse claque, pour sûr, dont on se relève un peu sonné. C’est cru, c’est direct, c’est violent, c’est insupportable, c’est poignant. Je ne le classerais pas dans la catégorie des chefs-d’œuvre, parce que je n’ai pas été emporté par le style (encore qu’il serve parfaitement le propos), parce que l’histoire ne me hantera pas pendant des mois, parce que je trouve qu’on peut très facilement passer à côté de cette lecture (en partie parce qu’elle vous prend aux tripes, vous r’tourne comme une crêpe, et vous remue d’une façon pas toujours agréable). Mais qu’est-ce que ça raconte bien la complexité humaine, ce mélange d’amour et de haine, d’attraction/répulsion qui nous anime parfois, la complexité des sentiments, la façon dont celui d’attachement peut vous prendre en otage en dépit du bon sens, le conflit de loyauté qui peut nous ronger à l’occasion. Tu sais mon aversion pour les quatrièmes de couverture, j’essaie donc de ne rien dire de l’histoire, mais déjà là j’ai l’impression de trop en révéler (et oui, je me rends compte que je ne le précise qu’à la fin et que c’est un tout petit peu con, je m’en excuse a posteriori). Cela dit, je préfère mille fois acheter un bouquin sur un ressenti plutôt que sur un résumé, alors je me permets de te livrer le mien.

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