Les 100 premiers – Pygmalion

Pygmalion, c’est, entre plein d’autres choses, la maison française du Trône de fer (George Martin) et de L’Assassin royal (Robin Hobb), repris en poche chez J’ai lu. C’est aussi le même groupe (Flammarion, puis Madrigall), pas mal de services et de personnes en commun, les passerelles sont donc nombreuses entre les deux maisons. Et quand la directrice littéraire de l’une est partie chez l’autre et m’a fait l’amitié de me proposer de poursuivre notre collaboration, j’ai évidemment sauté sur l’occasion et de joie.

Déracinée (Uprooted), Naomi Novik (2015)

937 000 signes.

Je m’attendais à une histoire de magie et de dragons, j’ai été contenté par la première partie, et pour le moins bluffé (dans un sens positif) par la seconde. Le style de Naomi Novik est vraiment très particulier, pas forcément facile à appréhender, et le résultat est toujours hors du commun. C’est d’ailleurs sans doute ce qui lui vaut tous ces prix (notamment le Nebula et le Locus pour Déracinée). Ce roman, formidable, s’inspire apparemment de la mythologie polonaise, et l’on retrouve à l’intérieur une certaine ambiance de conte de fées. La protagoniste possède certains traits de caractères communs avec El, celle d’Éducation meurtrière (voir plus bas). Cela ne la rend pas tellement agréable de prime abord, mais on s’attache malgré tout vite à elle, car les aspects agaçants de sa personnalité sont aussi ses principales qualités. Comme dans un entretien d’embauche où l’on te demanderait tes défauts, où tu répondrais en toute modestie « je suis trop rigoureux, trop exigeant, trop investi », mais à l’opposé.

Cher monde (Dear World), Toby Little (2016)

215 000 signes.

Toby est (plutôt était, car il a bien grandi depuis) un petit gamin de cinq ans qui, je ne sais plus pour quelle raison, s’est un jour piqué de communiquer avec des gens du monde entier. Il a commencé à envoyer des cartes postales à des connaissances vivant à l’étranger, puis le réseau s’est étendu, et il a fini par correspondre avec de parfaits inconnus. Il sait à peine écrire au début de son entreprise, les réponses sont donc souvent plus intéressantes que les sollicitations de l’enfant, qui se contente les premiers temps d’un « Salut, je m’appelle Toby, ça va ? », mais c’est très touchant de voir se créer une telle chaîne humaine, d’un bout à l’autre de la planète, et de savoir qu’un tout petit garçon en est à l’origine. Il n’a pas été toujours facile de traduire ces réponses venues du monde entier, car l’anglais est parfois approximatif, et je tenais donc à essayer de rendre cette impression sans donner à penser que la traduction l’était (approximative). De mémoire, le bouquin contient aussi un ou plusieurs cahiers photos, où on découvre Toby dans son quotidien, ou avec certains de ses correspondants, ou avec sa collection de cartes.

Magiciens des dieux (Magicians of Gods), Graham Hancock

1 192 000 signes.

Un très gros bouquin, vraiment pas simple à appréhender, car il développe des tas d’éléments (mythiques, mythologiques, astronomiques, astrologiques, historiques, géographiques, archéologiques et plein d’autres trucs en iques) pas forcément dans mes domaines de compétences. L’auteur y expose des théories alternatives à celles qui font consensus dans les milieux autorisés. Celle, par exemple, d’une civilisation perdue (la célèbre Atlantide ?) qui expliquerait certaines constructions (pyramides notamment) dont on peine encore à comprendre comment elles ont pu être réalisées sans la technologie actuelle.

J’ai trouvé cette étude géniale car tout s’appuie sur des faits concrets et des analyses scientifiques. Je n’adhère pas forcément à la démonstration du monsieur (parce que je n’y connais rien), mais il arrive à te convaincre ou à te faire douter en t’expliquant notamment que, quand on s’est trompé pendant un demi-siècle dans une discipline, il devient difficile de faire table rase de cinquante ans d’études foireuses pour repartir sur un autre paradigme, et qu’il est plus simple de modeler un peu certaines données pour les faire rentrer dans les cases qui t’arrangent ; en conséquence, les nouvelles théories (dont celles défendues par l’auteur) mettent du temps à s’implanter. Ça me fait penser aux pancartes dont le recto indique « Ce qui est écrit de l’autre côté est faux » et le verso « Ce qui est écrit de l’autre côté est vrai » : ça prend bien la tête parce qu’on ne sait plus par où attraper le truc, mais ça fait cogiter.

La démonstration ne résisterait pas forcément à la contradiction face à des pontes dans les domaines concernés (encore une fois, je n’en sais rien du tout), mais c’est le fait que ça pousse à se questionner qui me plaît. Ça me semble d’autant plus intéressant aujourd’hui, où la sphère complotiste est tellement vaste qu’on ne peut plus réfléchir hors des clous sans être taxé de complotisme, ce qui permet aux quelques complots véritables de passer sous les radars, puisqu’ils sont noyés au milieu de tout un paquet de faux complots. D’où l’existence de matriochkas de complots mondiaux visant à créer de faux complots pour camoufler les vrais complots, nous sachons. Bref, une bonne pierre à affûter l’esprit critique, pour autant qu’on ne tombe par dans l’écueil de tout prendre pour argent comptant.

Être parent en cas d’apocalypse (Only Dead on the Inside), James Breakwell (2017)

278 000 signes.

Si je ne m’abuse (et je ne m’abuse que rarement, car ce n’est pas très agréable), James Breakwell s’est fait connaître sur les réseaux sociaux pour son compte humoristique (dont j’ai bien sûr oublié le nom), où il raconte sa vie de famille à base de dessins mal faits et d’anecdotes souvent hilarantes et bourrées d’autodérision concernant son épouse, ses quatre filles et leurs cochons de compagnie. Il emploie exactement la même recette pour t’expliquer comment survivre (et sauver ta progéniture) quand tu as des enfants en bas âge et que survient l’inévitable apocalypse zombie. C’est très drôle, et je me suis beaucoup amusé à traduire ce bouquin, moins facile qu’il n’y paraît : l’humour nécessite beaucoup de flexibilité d’esprit et de gymnastique pour être transcrit d’une langue à une autre. Fait amusant, certains ont pris le titre au pied de la lettre et en ont fait une lecture quasi religieuse : attention, ce périlleux exercice est une cascade à ne pas reproduire chez vous.

Vauriens (Rogues), dir. George Martin et Gardner Dozois (2017)

1 771 000 signes.

Série Les Enfants indociles (Wayward Children), Seanan McGuire(2019-)

1. Les Portes perdues (Every Heart a Doorway) – 243 000 signes.

Je t’ai déjà parlé de ces novellas ici ou là, je n’en dirai donc pas grand-chose de plus. J’adore le fait que Seanan McGuire construise un univers avec des personnages récurrents, mais pas forcément dans l’ordre chronologique et où la focalisation ne se fait pas toujours sur le même endroit. C’est tour à tour drôle, prenant, émouvant, éprouvant même, parfois tout à la fois, c’est très facile/rapide à lire, mais on peut passer des heures à y réfléchir, car les messages y sont nombreux et les interprétations diverses. Je crois qu’il y a 8 bouquins déjà sortis en VO, et on ne compte plus les prix qui ont été décernés à chaque volume (l’ensemble a même reçu le Hugo de la meilleure série en 2022). Du très, très bon.

Série Scholomance, Naomi Novik (2020-2022)

3. The Golden Enclaves

Mis à part certains traits de personnalité de l’héroïne, cette trilogie n’a rien à voir avec Déracinée mentionné plus haut. Enfin si, la magie, mais les systèmes sont tellement différents qu’ils sont difficilement associables. Là aussi, je t’en ai déjà dit beaucoup sur les titres déjà parus, je ne vais donc pas te retenir plus que de raison (mais je t’invite évidemment à aller voir si tu veux plus de détails). Sache juste que tu as affaire à des élèves dans une école de magie, mais que ça ne saurait être plus différent d’Harry Potter : l’école n’existe pas vraiment, il n’y a pas de profs, et les élèves entament une formation de quatre ans en sachant d’emblée que la plupart n’en ressortiront pas vivants. Quatre années en vase clos, sans vacances ni aucun contact avec l’extérieur, et durant lesquelles tous les coups sont permis (car l’école doit de toute façon prélever son quota d’élèves, alors mieux vaut se méfier de tout le monde). Je vais trahir un petit secret en t’annonçant que je suis présentement en train de bosser sur la fin, et que je peux te spoiler quand je veux si tu n’es pas sage.

Bilan du bilan

Note qu’il y a aussi quatre autres bouquins dont j’ai très envie de te parler, mais qui ne sont pas encore sortis (ni programmés peut-être), alors je t’en dirai plus à l’occasion ! Sans rien dévoiler, mais pour que mon bilan soit complet, je peux te dire qu’ils font respectivement 988 000, 352 000, 558 000 et 261 000 signes.

Voilà donc 8 ans que je travaille pour Pygmalion, dans des domaines aussi variés que le registre épistolaire, le document scientifico-historique, le thriller social, l’humour ou l’imaginaire. 14 ouvrages de tailles diverses traduits (plus un en cours), près de 9 millions de signes, encore des années bien remplies !

Dans les épisodes précédents :

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