Comme j’ai décidé de ne plus travailler jusqu’à la fin de l’année (bon, ça s’est mal goupillé, normalement je décide ça plus tôt), l’heure est venue de dresser le traditionnel bilan pour l’année écoulée. Ça va être l’occasion de comparer 2022 à la précédente. À vue de nez, je dirais que j’ai plus travaillé, parce que je suis plus fatigué et que j’ai pris moins de congés, mais les apparences sont parfois trompeuses. Voyons, donc.
Les publications
7 de mes traductions ont été publiées cette année (je ne parle que des inédits, pas des sorties poches ni des rééditions), mais aucune cotraduction contrairement aux années précédentes. C’est un peu moins que la moyenne récente, qui tourne plutôt autour de 8 (9 l’année passée).
Elles sont réparties en seulement 4 éditeurs, contre 7 l’année dernière : Pygmalion (x2), HarperCollins (x2), SNAG (x2) et De Saxus.
Et seulement 5 autrices (aucun auteur), contre 8 en tout l’année dernière. Presque toutes sont de vieilles connaissances : Naomi Novik (pour sa série Éducation meurtrière), Seanan McGuire (pour la suite des Enfants indociles), Colleen Oakes (pour la trilogie dans l’univers de la Reine de Cœur d’Alice) et bien sûr Samantha Shannon, pour le tome 4 de Bone Season. Seule Faith Martin (pour les enquêtes de Loveday et Ryder) vient rejoindre la bande.
En voici la liste complète :

Éducation meurtrière (A Deadly Education) de Naomi Novik, Pygmalion
Imagine une école de sorcellerie hors de tout (même de la réalité physique) qui serait là moins pour former les sorciers que pour les protéger d’une morte quasi certaine au-dehors. Imagine que cette école représente elle-même un danger pour lesdits sorciers, et que seule une infime proportion d’entre eux peut espérer obtenir son diplôme (et donc regagner le monde réel plus ou moins en un seul morceau), ce qui est bien mais pas top – mais c’est toujours mieux que 0, ce qui fait que dans l’ensemble, ça va. Imagine une héroïne d’une causticité sans bornes, mélange de Mercredi Addams et de Nelly Oleson, qui te raconterait cette histoire en toute mauvaise foi. Mélange le tout avec la plume si particulière de Naomi Novik, et voilà, comme on dit en bon anglais.
(c) Djohr (
Feu d’artifice mortel (A Fatal Truth) et Couronnement fatal à Middle Fenton (A Fatal Affair) de Faith Martin, HarperCollins Noir
Trudy Loveday est une jeune policière que sa hiérarchie aimerait cantonner à des affaires sans enjeu ni intérêt (on est dans l’Angleterre des années 1960, elle est la seule femme de l’équipe). Clement Ryder est un ancien chirurgien contraint de se reconvertir coroner après s’être diagnostiqué tout seul comme un grand la maladie de Parkinson (qu’il cherche encore à dissimuler à tout le monde). Tous deux vont former un attelage inattendu pour résoudre des affaires à première vue bénignes, mais en fait non. Ces cosy-crimes (#enquêtesenpantoufles) peuvent parfaitement se lire dans le désordre (Feu d’artifice est le 4e tome de la série, Couronnement le 5e) si l’on s’en tient à l’histoire (les enquêtes sont toutes indépendantes). Si l’on préfère suivre l’évolution des personnages, mieux vaut évidemment les lire dans l’ordre.

De brindilles et d’os (Down Among the Sticks and Bones), de Seanan McGuire, Pygmalion
Tome 2 de la série des Enfants indociles, il peut se lire parfaitement indépendamment du premier. On s’attache ici à deux des personnages des Portes perdues (les jumelles Jack et Jill), mais cela raconte leur vie avant leur arrivée au foyer. Cette série fantastique (dans tous les sens du terme) fait la part belle à la diversité et aux rêves (perdus) de jeunesse, à l’insatisfaction permanente dont nous souffrons souvent. J’aime beaucoup ce principe de novellas dans un univers commun mais sans chronologie réelle. En fonction des goûts, certains tomes plairont plus ou moins, mais l’univers créé par l’autrice est vraiment très intéressant.
(c) Ruben Ireland 2016 (c) Ruben Ireland 2016
Blood of Wonderland et War of the Cards de Colleen Oakes, SNAG
Dans ces deuxième et troisième tomes de la trilogie consacrée à l’enfance de la Reine de Cœur du Pays des Merveilles, on suit l’évolution de Dinah qui, injustement évincée du trône, décide de partir en reconquête. On comprend mieux les côtés sombres de la Reine d’Alice grâce à cette réinterprétation libre et toute personnelle de l’œuvre de Lewis Carroll (les clins d’œil y sont d’ailleurs nombreux, pour les aficionados de ces livres ou de leurs adaptations). J’ignore si l’autrice décidera ensuite de se pencher sur l’un ou l’autre personnage secondaire des romans d’origine, mais certains sont déjà évoqués ici (Cheshire notamment).

Le Masque tombe (The Mask Falling) de Samantha Shannon, De Saxus
Quatrième tome de la série The Bone Season (qui devrait en compter 7), près de dix ans après la parution du premier. Les traductions vers le français avaient pris quelques années de retard, mais nous sommes désormais revenus à hauteur de la VO. Impossible de te résumer une tétralogie en trois lignes sans prendre le risque de divulgâcher, sache juste, si tu ne connais pas déjà cet univers, que tu commets une grave erreur. Et que tu en commets une autre si tu ne connais pas non plus les autres bouquins de Samantha. Si quand même tu tiens à en savoir plus, j’ai déjà évoqué la question par ici.
Au niveau des publications, tant en quantité qu’en diversité, force est de constater que 2022 a été légèrement moins productive que 2021. Mais ce n’est pas nécessairement représentatif de mon année de travail, car la plupart de ces publications ont été traduites antérieurement à l’année qui s’achève.
Les travaux de 2022
En effet, parmi les titres parus cette année, seuls Couronnement fatal et The War of Cards ont été traduits l’année de leur publication. Si ma mémoire est bonne, j’avais fini le premier jet de Blood of Wonderland et du Masque tombe, qu’il me restait donc à relire/peaufiner, et rendu tous les autres.
Outre les 2 premiers cités, j’ai aussi traduit 3 très courts romans (qui paraîtront en un seul volume), 2 novellas, 4 romans de taille moyenne et 1 mastodonte, soit 12 bouquins en tout. Pile le même nombre qu’en 2021, même s’il y avait une cotraduction dans le lot. Deux sont encore à relire, les autres ont tous été rendus.
En nombre de signes, on dépasse de peu les 6 millions, contre 5,8M l’année dernière, autant dire que c’est kif-kif, à une novella près. Si tu n’aimes pas compter en signes, ça donne environ 1 million de mots. J’aurais juré que la différence était plus grande, peut-être parce que ma fin d’année (depuis juillet quand même) a été particulièrement dense.
Concernant les sorties auxquelles tu peux t’attendre en 2023, voici celles qui ont déjà été annoncées sur les sites de vente en ligne :

Dragon Assassin – 1, d’Arthur Slade, PKJ (5 janvier 2023)
C’est là le recueil des 3 très courts romans évoqués plus haut. Comme tu l’auras deviné, avec la sagacité qui te caractérise, il y sera question de dragons et d’assassins. Une série qui ravira les plus jeunes (10/12 ans, j’imagine ? Je ne suis pas très fort en âges), mais que j’ai pris beaucoup de plaisir à traduire, je t’en dirai plus à la sortie.

Promotion funeste (The Last Graduate), de Naomi Novik, Pygmalion (18 janvier 2023)
Deuxième leçon dans la trilogie de la Scholomance, qui fait directement suite à Éducation meurtrière. Ce roman a été récompensé par le prix Lodestar du meilleur roman pour jeunes adultes, ce qui est assez chouette (et complètement mérité je trouve).

Sous un ciel de sucre (Beneath A Sugar Sky), de Seanan McGuire, Pygmalion (15 février 2023)
Troisième tome des Enfants indociles, la série multiprimée, peut-être plus difficile que les autres à lire indépendamment, car tous les éléments du background ne sont pas réexpliqués. La couverture n’apparaît pas encore sur les différents sites, mais ça ne saurait tarder.

Un jour de nuit tombée (A Day of Fallen Night), de Samantha Shannon, De Saxus (mars 2023)
Mon mastodonte de l’année, dont tu as déjà entendu parler un certain nombre de fois si tu te promènes de temps à autre sur ce site. L’une de mes plus grosses fiertés de traducteur aussi, car ce sont 2 millions de signes que j’ai dû traduire en un temps record pour permettre une sortie simultanée avec la VO. (Je sais, je me répète, laisse-moi jubiler encore quelques dizaines de fois.) Ce roman géant se déroule 500 ans avant Le Prieuré de l’Oranger.
Pour les autres, il va te falloir prendre ton mal en patience, je ne piperai mot !
What’s next?
Je ne sais que penser de l’année à venir. J’ai certes quatre contrats déjà signés, mais deux textes sont déjà traduits, il ne me reste qu’à les relire. J’ai par ailleurs un accord verbal pour trois autres projets, dont deux se concrétiseront de façon à peu près certaine. Je croise les doigts pour le troisième qui me tient TRÈS à cœur, mais plus le temps passe, plus le doute me gagne. Je vais me relancer dans la prospection (mais je trouve rarement le bon timing pour le faire), j’ai un projet d’écriture en cours que j’espère concrétiser (mais comme je répète ça chaque année, on va dire que c’est du 50/50, voire un peu moins), mais tout cela va me laisser beaucoup de temps. Si ça se trouve, je vais en profiter pour souffler 5 minutes, c’est peut-être pas mal non plus.
Un avis sur « Bilan 2022 en chiffres et en lettres »